Aussi loin qu'il s'en souvienne, Ethan a toujours été accompagné de sa sœur. Bien que leurs apprentissages aient divergé alors qu'ils étaient encore très jeune, leur complicité n'en avait jamais souffert et ils trouvaient toujours le moyen de se retrouver afin de chahuter d'une manière ou d'une autre. S'était probablement de là que le goût du combat était venu à sa sœur. Dans la bouche de n'importe quelle autre fille, il aurait trouvé absurde l'idée de vouloir combattre. Pourtant, pour Morgane, il avait tendance à faire toutes les exceptions possible et la soutenait, quoi qu'il arrive. S'était le lien qui les unissait, en somme.

 

C'est lui qui lui apprit à se battre, et s'il se montrait parfois jaloux lorsqu'elle maîtrisait mieux les armes que lui, il en ressentait également une fierté toute particulière à l'idée qu'il était celui qui lui avait tout de même enseigné les technique.

 

Cependant il apparut rapidement qu'Ethan n'était pas fait pour les métiers d'armes. Il les maîtrisait en effet mais il ne mettait pas assez de cœur à l'ouvrage pour devenir un véritable maître, et continua donc cette apprentissage de manière occasionnelle, tout en s'intéressant à sa véritable passion : la bijouterie. Il avait toujours adoré dessiner les modèles les plus raffinés possible pour mettre en valeur telle ou telle dame. Une sensibilité qu'il avait surement hérité de sa sœur, mais qu'importe.

 

Il installa sa boutique dans le village et c'est là qu'il rencontré Delancy. Delancy était la maîtresse d'un vieux lord dont la lady ne le satisfaisait vraisemblablement plus. Elle était jeune, de cette fraicheur qui jamais ne se fanent. Une peau de porcelaine, un regard étincelant, une bouche pleine et rosée, un petit nez en trompette... elle l'avait captivé, tant et si bien qu'il lui fit la cours sans attendre. Cela ne plut bien sure pas au vieux lord qui quitta la boutique en colère, suivi de sa jeune maîtresse. Ce soir là, en rentrant, Ethan était persuadé de ne plus jamais la revoir. Mais le lendemain, Delancy revint à la boutique.

 

Ils commencèrent alors à se fréquenter, ignorant les rumeurs qui courraient sur Delancy. Ethan n'était pas naïf au point de croire que sa vertu avait été préservée, mais il était tellement épris d'elle qu'il s'en fichait. Il défia ses parents, qui le déshéritèrent, et quitta le domicile familial. Cette période ne fut pas des plus facile à vivre pour lui : il était encore jeune, et si son commerce marchait correctement, sa sœur lui manquait. Elle lui rendait parfois visite, au grand damne de Delancy qui trouvait Morgane trop envahissante. Ce fut malgré tout le seul point sur lequel il ne céda jamais à sa fiancée.

 

La première année se passa sans anicroche. La bijouterie marchait bien et Ethan couvrait sa fiancée de cadeaux, mais celle-ci en demandait toujours plus. Habituée à un train de vie que le comte déshérité ne pouvait plus lui offrir, Delancy tirait sur la corde jusqu'à amener la bijouterie au bord de la faillite. Et lorsqu'Ethan, presque ruiné, lui refusa le bijoux qu'elle désirait tant – une commande spéciale faite par un Marquis très amoureux de sa femme – elle devint des plus froide. Désertant le lit de son fiancé, Delancy découchait rarement chez eux – ils vivaient au dessus de la boutique – mais Ethan continuait à garder espoir, éperdu d'amour qu'il était.

 

Ce n'est qu'un jour, alors qu'il se rendait au point de rendez-vous pour voir sa sœur, qu'il croisa Delancy. Affublée de nouvelles parures, elle était au bras d'une jeune marquis qui venait souvent à la boutique. Lorsqu'il tenta d'aller lui parler, elle l'ignora royalement, prétendant ne pas le connaitre.

 

C'est à ce moment que le charme se brisa. Ethan fit demi-tour, oubliant qu'il devait rejoindre sa sœur et retourna à la boutique. Il rassembla les affaires de sa fiancée, ou plutôt de son ex fiancée, et les jeta sur le trottoir sans préavis. Il s'était laissé abuser par la beauté irréelle de la jeune femme, avait cru être amoureux, mais il n'en était rien. Son cœur était vide face à cette trahison, et il comprit alors que toutes les femmes n'étaient que de belles garces vénales prêtes à tout pour obtenir ce qu'elles veulent. Toutes ? Non, sa sœur n'était pas ainsi.

 

C'est ainsi qu'Ethan retourna chez lui, repentant auprès de ses parents, et reprit sa vie auprès de sa sœur. Il tenait toujours la boutique au village, mais ses dessins semblaient avoir perdu leur innocence, et lorsqu'il voyait un couple heureux entrer dans la boutique, il ne pouvait s'empêcher de se dire que cette femme ne voulait que de l'argent.